Stéphane Lenormand (député, Saint-Pierre-et-Miquelon) : « Proposer des déclinaisons pratico-pratiques de la décentralisation »

Vous êtes le nouveau président de la Commission Outre-mer de la FedEpl. Pourquoi avoir répondu favorablement à cette proposition ?

Je suis député depuis 2022. C’est une mission dans laquelle je m’investis fortement. Mais j’ai toujours l’âme chevillée au corps de l’élu local, de terrain, celui qui voit les choses se réaliser. J’adore le mandat de député mais il est plus virtuel (Ndlr, il est président du groupe Liot à l’Assemblée nationale). J’ai été élu local pendant 20 ans, président du Conseil territorial de Saint-Pierre-et-Miquelon. J’ai été aussi président d’une Sem locale d’aménagement. Je voulais rester au contact de cette réalité de terrain et la présidence de la commission m’offre cette possibilité.

Comment percevez-vous les priorités pour les Epl ultramarines ?

Je suis un fervent défenseur de la décentralisation, notamment dans les territoires ultramarins. Il faut donner un maximum de pouvoirs à ces territoires, essayer de favoriser l’harmonisation des normes en prenant en compte leur environnement. Chacun d’entre nous doit pouvoir dégager le mode d’emploi qui lui correspond le mieux. Les Epl donnent cette possibilité, cette souplesse, il est donc nécessaire aussi de mieux sécuriser les élus qui s’y investissent.

Avez-vous arrêté une feuille de route en votre qualité de président de cette commission ?

Je souhaite que tous les territoires me remontent leurs besoins, afin de dégager des synergies, alimenter les cadres de la FedEpl des sujets prioritaires qui sont les nôtres afin qu’ils puissent peser sur les ministères, pour rendre la vie des élus plus facile. Je souhaite bien entendu porter tous ces débats aussi à l’Assemblée nationale. 90 % des Outre-mer sont des îles, en dehors de la Guyane, elle-même très enclavée. Cette insularité génère de fait des similitudes dans la manière d’aborder et de trouver des solutions entre nous. Si les contextes diffèrent, les modalités opérationnelles sont identiques. Nous souhaitons tous une déclinaison pratico-pratique de la décentralisation.

Vous pointez du doigt cette recentralisation de l’Etat, peut-être plus fortement ressentie encore dans les territoires ultramarins…

Chaque loi votée devait avoir une déclinaison pour chacun d’entre nous. Par exemple, sur la fin de vie, les soins palliatifs, le texte de loi en débat stipule qu’en Polynésie, à Mayotte et à Saint-Pierre-et-Miquelon, la loi se déploiera à travers des ordonnances. Qu’est-ce à dire ? Va-t-on nous imposer une décision d’en haut sans avoir sondé les acteurs locaux ? Pour les normes, c’est le même problème. Nous sommes à Saint-Pierre-et-Miquelon, dans le voisinage du Canada et des Etats-Unis : les normes européennes et donc françaises auxquelles nous sommes soumis ne sont pas celles de ces deux pays. Les surcoûts en matière de transports de certains produits sont trop élevés. On fait faire des centaines de kilomètres à des produits normés européens alors qu’ils sont à quelques kilomètres de chez nous et donc à des prix moins élevés.

Ce débat sur le surcoût des normes revient souvent dans les bouches des élus ultramarins. Espérez-vous un jour apporter une amélioration supplémentaire ?

Il semblerait que Manuel Valls ait pris le sujet à bras le corps. Nous attendons avec impatience les débats parlementaires autour de la vie chère dans l’Outre-mer, prévus fin juin. Il faudrait faire plus confiance aux élus pour qu’ils mettent en place des solutions plus pragmatiques. Il faut aussi protéger les élus, notamment ceux des Epl, pour qu’ils soient encouragés à aller dans cette direction.